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HISTOIRE DE L' ESCLAVAGE EN OCCIDENT 1ère PARTIE

par Jean-Pierre Pazzoni

LES PORTUGAIS EN AFRIQUE

Henri le navigateur (1394-1460) roi de Portugal. Son règne marque le début de l'exploration de la côte de l'Afrique jusqu'à la Sierra Leone. Il fait développer les sciences de la navigation. Le but est de trouver de l'or. On pensait à cette époque que l'or se trouvait dans les pays chauds et que le soleil était à l'origine de la formation du métal précieux. Le commerce commence avec les Africains sous forme de troc. Ceux-ci possèdent des esclaves; ils proviennent de la capture d'ennemis dans les guerres inter-ethniques. Ils peuvent servir de monnaie d'échange dans le commerce. Ils sont loués par les Portugais aux rois et aux chefs de village africains pour travailler à leur service, souvent dans les mines.

Jean II (1455-1494); le roi a besoin de fonds pour financer ses campagnes au Maroc. Il accorde un bail à un très riche commerçant en 1469 pour cinq ans. Celui-ci s'engage à explorer la côte de l'Afrique d'au moins trois cent cinquante milles par an vers le sud à partir de la Sierra Leone; celui-ci verse au roi une rente annuelle très élevée en échange de droits commerciaux.

Au deuxième voyage d'exploration, deux navigateurs arrivent à El Mina en 1470,(La Mine; au Ghana actuel) où ils apprennent que le territoire des Ashantis regorge d'or. Le roi de Portugal envoie douze navires pour y faire construire un fort et fonder une ville. La traite des esclaves africains, officiellement, commence ici. Ils sont troqués contre des marchandises dont les rois ont besoin: barres de fer, vêtements, armes à feu, toutes sortes d'ustensiles. Les esclaves sont d'abord employés sur place pour travailler à la mine. Ils sont inhumainement traités. Christophe Colomb est venu ici pour mesurer le degré terrestre quelques années avant la découverte de l'Amérique; il y a vu les esclaves; cela lui donnera l'idée d'asservir les Indiens après sa découverte. Les Portugais découvrent ensuite l'île déserte de Sao Tomé en 1471. Ils y découvrent un gisement d'étain. Deux missionnaires portugais servent d'intermédiaires avec le roi du Congo pour traiter l'achat d'esclaves bantous. Ceux-ci arriveront dans l'île pour exploiter le minerai et commencer la culture industrielle de la canne à sucre. En effet, les Européens savent maintenant fabriquer le sucre avec le jus de cette plante et la demande en Europe pour ce nouvel aliment est très forte. Cette culture demande une nombreuse main-d'œuvre ne coûtant pas cher. Au début du XVIIème siècle, les colons partent pour le Brésil et apportent avec eux l'habitude de l'esclavage des Noirs.

Maison des esclaves portugaise au Ghana

L' ESCLAVAGE ET LE GÉNOCIDE DES AMÉRINDIENS

1492- Les Maures capitulent à Grenade, l'Espagne est entièrement Catholique; la reine, faisant preuve de charité chrétienne face à l'Islam, abolit l'esclavage en Espagne. (les Maures avaient des esclaves). Ce triomphe permettra à Christophe Colomb de faire son voyage, les rois d'Espagne ayant retrouvé dans cette victoire un moral de fer.

12 octobre 1492- Christophe Colomb découvre, croyant arriver au Japon, les Bahamas, Cuba et Haïti qui deviendra Hispaniola dès son premier voyage; Il embarque six Indiens aux Bahamas, sans leur consentement, pour servir de guides et en faire des interprètes. Il les emmène en Espagne et ceux-ci seront baptisés et anoblis en grande pompe à Barcelone; le roi et son fils seront leurs parrains.

Quelques années plus tard, les Espagnols embarquent sur leurs vaisseaux autant d'Indiens qu'ils peuvent en prendre aux Bahamas et les vendent en Espagne comme esclaves pour amortir le coût de leur voyage, n'ayant pas trouvé assez d'or à Hispaniola.

Le génocide commence dans les Grandes Antilles, les indiens sont brûlés vifs parce qu'ils préfèrent mourir plutôt que d'être esclaves. Voici des extraits de la "Très brève relation de la destruction des Indes" de Bartolomé de Las Casas*: " Comme nous l'avons dit, l'île Espagnole (Hispaniola) est la première où les chrétiens sont entrés et où commencèrent les grands ravages et les grandes destructions de ces peuples; la première qu'ils ont détruite et dépeuplée. Ils ont commencé par prendre aux Indiens leurs femmes et leurs enfants pour s'en servir et en faire mauvais usage, et par manger leur nourriture qui venait de leur sueur et de leur travail; ils ne se contentaient pas de ce que les Indiens leur donnaient de bon gré, chacun suivant ses possibilités; celles-ci sont maigres, car ils ne possèdent généralement pas plus que ce dont ils ont besoin d'ordinaire, et qu'ils produisent avec peu d'effort; ce qui suffit à trois familles de dix personnes chacune pour un mois, un chrétien le mange et le détruit en un jour. Devant tant d'autres violences et vexations, les Indiens commencèrent à comprendre que ces hommes ne devaient pas être venus du ciel..."

"Ils embrochaient sur une épée des enfants avec leur mères et tous ceux qui se trouvaient devant eux. Ils faisaient de longues potences où les pieds touchaient presque terre et par groupes de treize, pour honorer et révérer notre Rédempteur et les douze apôtres; ils y mettaient le feu et les brûlaient vifs. D'autres leur attachaient tout le corps dans de la paille sèche et y mettaient le feu; c'est ainsi qu'ils les brûlaient. A d'autres et à tous ceux qu'ils voulaient prendre en vie ils coupaient les deux mains, et les mains leur pendaient; et ils leur disaient: << Allez porter les lettres>>, ce qui signifiait d'aller porter la nouvelle à ceux qui s'étaient enfuis dans les forêts. C'est ainsi qu'ils tuaient généralement les seigneurs et les nobles; ils faisaient un gril de baguettes sur des fourches, ils les y attachaient et mettaient dessous un feu doux, pour que peu à peu, dans les hurlements que provoquaient ces tortures horribles, ils rendent l'âme. J'ai vu une fois brûler sur les grils quatre ou cinq seigneurs important (et je crois même qu'il y avait deux ou trois paires de grils où d'autres brûlaient). Comme ils poussaient de grands cris et qu'ils faisaient pitié au capitaine, ou bien qu'ils l'empêchaient de dormir, celui-ci ordonna de les noyer; et l'alguazil, qui était pire que le bourreau qui les brûlait (et je sais comment il s'appelait; j'ai même connu sa famille à Séville), n'a pas voulu les noyer; il leur a d'abord mis de ses propres mains des morceaux de bois dans la bouche pour qu'ils ne fassent pas de bruit, puis il a attisé le feu pour qu'ils rôtissent lentement, comme il le voulait..."

"Le soin qu'ils prirent des Indiens fut d'envoyer les hommes dans les mines pour en tirer de l'or, ce qui est un travail intolérable; quant aux femmes, ils les plaçaient aux champs, dans des fermes, pour qu'elles labourent et cultivent la terre, ce qui est un travail d'hommes très solides et rudes. Ils ne donnaient à manger aux uns et aux autres que des herbes et des aliments sans consistance; le lait séchait dans les seins des femmes accouchées et tous les bébés moururent donc très vite. Comme les maris étaient éloignés et ne voyaient jamais leurs femmes, la procréation cessa. Les hommes moururent dans les mines d'épuisement et de faim, et les femmes dans les fermes pour les mêmes raisons... Dire les coups de fouet, de bâtons, les soufflets, les coups de poings, les injures et mille autres tourments que les chrétiens leur infligeaient quand ils travaillaient, il faudrait beaucoup de temps et de papier; on n'arriverait pas à le dire et les hommes en seraient épouvantés."

"Les Espagnols plongent les Indiens dans la mer par trois, quatre ou cinq brasses de fond, du matin au coucher du soleil; ils sont toujours sous l'eau, nageant sans respirer, arrachant les huîtres où vivent les perles. Ils ressortent avec des petits filets pleins d'huîtres pour respirer; un bourreau espagnol se tient dans un canot ou dans une barque, et si les pêcheurs se reposent trop longtemps, il leur donne des coups de poings et les rejette à l'eau en les prenant par les cheveux pour qu'ils retournent pêcher."

Grâce à l'intervention de Bartolomé de Las Casas, le défenseur des Indiens, le roi d'Espagne fera interdire "l'encomendia", c'est-à-dire l'esclavage des Indiens. Les Portugais avaient déjà commencé à faire travailler les Africains dans les plantations de cannes à sucre à Sao Tomé et au Brésil et l'esclavage des Noirs va se développer dès lors.

*Bartolomé de Las Casas (1474-1566) est un prêtre humaniste qui fit interdire "l'encomendia", c'est-à-dire l'esclavage des Indiens; les Européens développèrent ensuite l'esclavage des Africains. Ces extraits sont tirés d'un livre publié par les Éditions La Découverte, 9 bis, rue Abel-Hovelacque, Paris 75013. "Très brève relation de la destruction des Indes" de Bartolomé de Las Casas. © librairie François Maspero, Paris 1979; éditions La Découverte, Paris 1983;. ISBN 2-7071-1114-7.

HISTOIRE DE L' ESCLAVAGE 2ème partie

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